“L’Observatoire International pour la Démocratie et la Gouvernance (OIDG) vous adresse cette lettre ouverte afin d’attirer votre attention sur la grave crise de sécurité qui sévit en Haïti et ses répercussions grandissantes au Canada et chez nos voisins américains”.
“La situation en Haïti atteint un point critique où votre ministère se trouve actuellement incapable de superviser sur le terrain les projets financés à hauteur de millions de dollars par des contribuables canadiens. Votre ambassadeur en Haïti, monsieur André François Giroux, ne peut circuler librement pour évaluer des initiatives comme soutenues par le Canada. Cette incapacité opérationnelle reflète les conséquences directes du soutien canadien à des approches inefficaces, mal coordonnées et, en fin de compte, contre-productives. Ces failles menacent non seulement la stabilité régionale, mais également la sécurité des frontières canadiennes”.
“En mars dernier, vous nous avez consultés au sujet de la mise en place du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), composé de neuf membres, chargés de diriger le pays. Nous vous avions fait part de nos réserves quant à la capacité de ce modèle de gouvernance à pouvoir répondre aux défis majeurs d’Haïti. Plus récemment, lors d’une table ronde sur Haïti, nous avons également insisté sur l’urgence d’un soutien international plus structuré pour renforcer les forces de sécurité haïtiennes”.
“Cependant, le Canada a opté pour des mesures disparates : 5 millions de dollars injectés dans un fonds d’appui à la Police nationale d’Haïti et le déploiement de deux navires de défense côtière pour des opérations de surveillance (entre autres de ce qui est fait dans le spectre du visible). Ces efforts, bien que louables, sont manifestement insuffisants et manquent de cohérence stratégique. Pire encore, malgré cet appui, la situation continue de se détériorer à un rythme alarmant”.
“Les répercussions de cette crise ne se limitent pas aux frontières haïtiennes. Elles affecteront directement le Canada par une intensification des flux migratoires. Actuellement, pour des milliers d’Haïtiens, fuir Haïti reste leur seule échappatoire face à l’insécurité
et à la dégradation de leurs conditions de vie. Cette fuite se dirige naturellement vers les États-Unis, puis le Canada, attirés par les opportunités d’intégration en français”.
“Une détérioration prolongée en Haïti augmentera inévitablement les demandes d’asile au Canada, accentuant ainsi la pression sur un système d’immigration déjà à bout de souffle. Par ailleurs, la montée de l’insécurité, illustrée récemment par des tirs d’arme automatique sur des avions de ligne, transforme Haïti en une zone dangereuse à quelques heures de vol de Montréal, comparable aux théâtres de crise comme l’Ukraine, Gaza ou le Sahel”.
“La République dominicaine, voisine immédiate d’Haïti, qualifie désormais les Haïtiens de « terroristes », un narratif qui ne fait de ternir
davantage l’image internationale du pays et de complexifier ses relations diplomatiques. Madame la Ministre, serez-vous celle dont les
politiques auront contribué à transformer un pays qui aurait pu devenir une destination prisée des Canadiens en un narco-État, une entité de chaos?”
Un appel à un leadership renouvelé
Face à cette crise, nous sollicitons votre leadership pour réunir les partenaires internationaux autour d’un agenda commun, clair et cohérent. Cet agenda devra répondre à une question essentielle : le Canada doit-il continuer de soutenir un modèle de gouvernance qui montre chaque jour ses limites ?
Madame la Ministre, une simple revue de presse haïtienne suffirait à vous convaincre de la détresse des citoyens : celle de l’Haïtien resté au pays, celle de ceux qui, dans la précarité aux États-Unis, espèrent encore trouver refuge au Canada. Il est impératif d’agir pour épargner au Canada une crise migratoire et sécuritaire aux conséquences graves pour toute la région, que certains de vos partenaires semblent minimiser.
Dans l’espoir que cette lettre retiendra votre attention, nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération.
Réf:
Le Canada déploie deux navires de la classe Kingston en Haïti en réponse à la crise sécuritaire qui se détériore février 17, 2023
Ambroise Guillaume, Ph.D.
Président
Observatoire International pour la Démocratie et la Gouvernance (OIDG)
1805, rue Sauvé Ouest bureau 321
Montréal ( Québec) H4N 3B8
Tél. :514 586-5480
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